Laurent Nuñez: "J’aurai la même fermeté que Bruno Retailleau,... Ces bons clients de la presse algérienne"
- gherrrabi
- il y a 7 heures
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L'affaire Boualem Sansal, les influenceurs algériens, les refus d'Alger d'accueillir ses ressortissants soumis à une OQTF, le cas Christophe Gleizes, l'expulsion des diplomates d'un côté comme de l'autre… Depuis plus d'un an, les tensions entre Alger et Paris sont vives. Laurent Nuñez, qui a succédé à Bruno Retailleau, à la tête du ministère de l'Intérieur le 12 octobre dernier, est désormais en première ligne pour gérer ces dossiers.

La nomination de Laurent Nuñez au ministère de l’Intérieur suscite un regard attentif, notamment à Alger, où les relations avec la France connaissent depuis plus d’un an une forte tension diplomatique. Invité de l’émission "Questions politiques", sur Franceinfo, ce dimanche, ce fils d’un pied-noir d’origine andalouse a insisté sur la nécessité d’un "bougé" dans le dialogue sécuritaire entre Paris et Alger, actuellement interrompu en raison notamment du refus algérien de reprendre certains ressortissants sous obligation de quitter le territoire français (OQTF). "On a 40 % d’Algériens dans les centres de rétention administratives, a précisé le ministre. Il faudra évidemment qu’on ait de nouveau la reprise du flux des laissez-passer. Je vais m’y atteler", a ajouté le ministre de l’Intérieur, précisant qu’il n’avait pas encore pris contact avec son homologue algérien.
Laurent Nuñez, de son nom complet Laurent Nuñez-Belda, né le 19 février 1964 à Bourges (Cher), est un préfet, haut fonctionnaire et homme politique français. Au 21 juillet 2022, il était préfet de police de Paris, après avoir été notamment coordinateur national du renseignement et de la lutte contre le terrorisme (2020-2022), secrétaire d'État auprès du ministre de l'Intérieur Christophe Castaner (2018-2020), directeur général de la direction générale de la Sécurité intérieure (DGSI) (2017-2018) et préfet de police des Bouches-du-Rhône (2015-2017). Il est nommé ministre de l'Intérieur dans le gouvernement Lecornu II le 12 octobre 2025.

Interrogé sur un rapport parlementaire rendu public le 15 octobre qui proposait de remettre en cause les dérogations accordées aux Algériens dans le cadre de l’accord franco-algérien de 1968, Laurent Nuñez n’a pas souhaité se prononcer. "Il y a cet accord, il fonctionne, il n’est pas complètement parfait, je vous le concède, mais pour l’instant, ce n’est pas à l’ordre du jour", a-t-il expliqué. Présenté par les députés macronistes, Mathieu Lefèvre, devenu ministre délégué à la Transition écologique, et Charles Rodwell, le document propose de mettre fin au statut unique conféré aux Algériens en matière de circulation, de séjour, d’emploi et de protection sociale.
La "même fermeté" mais une "rupture dans la forme"

«Il faut qu'on reprenne le dialogue avec les Algériens, sur les questions de sécurité et d'échanges d'informations. On parle d'antiterrorisme, on parle de narcotrafic. Je veillerai à ce qu'à un moment, on reprenne langue à un niveau technique, à un niveau sécuritaire, ça me paraît important» Laurent Nuñez
En pleine crise diplomatique, l’ancien ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau avait également dit à plusieurs reprises son souhait de le remettre en cause. Les Algériens occupent la tête des nationalités étrangères présentes en France - on y comptait 649 991 Algériens en 2024 - et la deuxième place pour les obtentions d’un premier titre de séjour. Ils sont également la première nationalité interpellée en France en situation irrégulière avec 33 754 personnes en 2024.
« Rétablir l’ordre. » Bruno Retailleau, ministre de l’Intérieur, en a fait sa priorité. Il l’a martelé à plusieurs reprises en arrivant place Beauvau et le réaffirme dès qu’il en a l’occasion, détaillant quelques pistes pour y arriver, notamment la lutte contre le narcotrafic et l’immigration. Un programme qui laisse les Français dubitatifs.

Sur le plan migratoire, Laurent Nuñez affiche une ligne ferme, affirmant vouloir poursuivre les politiques engagées par son prédécesseur Gérald Darmanin, en insistant sur la nécessité d’augmenter les reconduites à la frontière et de faire appliquer la loi avec rigueur. "J’aurai la même fermeté que Bruno Retailleau", a-t-il déclaré, tout en revendiquant une "rupture dans la forme" pour ne pas "diviser la société". "Il y a des mots que je n’utiliserai pas", a-t-il insisté. "Quand vous convoquez le débat sur l’assimilation… Je ne le ferai jamais. L’assimilation, c’est certes un mot qui existe dans le code civil, mais vous renvoyez forcément ça au débat 'intégration versus assimilation'. Moi, je crois à l’intégration. On s’intègre parce qu’on respecte les règles des valeurs républicaines", a-t-il expliqué.
Bruno Retailleau, était le bon client de la presse algérienne
Depuis l’arrestation controversée d’un agent consulaire algérien en France, la presse algérienne s’en prend violemment à Bruno Retailleau. Accusé de saboter les relations entre Paris et Alger, il est décrit comme un « monstre froid » animé par un « anti-algérianisme maladif ».
Il ne se passe presque pas un jour sans que le ministre de l'Intérieur fasse les gros titres en Algérie. Il est devenu un ennemi de la junte militaire algérienne.
Il est devenu l’ennemi public numéro un. Depuis plusieurs jours, les éditoriaux algériens ciblent nommément Bruno Retailleau, accusé d’avoir relancé l’escalade entre la France et l’Algérie après l’expulsion réciproque d’agents consulaires.
« Anti-algérianisme maladif »
Le ton est le même dans L’Expression, qui décrit le ministre de l’Intérieur comme « le principal artisan de cette crise algéro-française », animé par un « anti-algérianisme maladif » et prêt à « sacrifier tout ce que ses prédécesseurs ont pu bâtir » pour servir « ses ambitions purement personnelles », expliquant sa véhémence à l’égard d’Alger par l’élection interne pour prendre la tête des Républicains. Le quotidien décrit le Vendéen : « Dans sa frêle silhouette, qui cache en réalité un monstre froid, dégoulinant de haine et de racisme ».
Selon TSA, les « attaques » de Bruno Retailleau « contre l’Algérie avaient commencé dès son entrée au gouvernement en septembre dernier » et ses « multiples interventions ont fini par rendre difficile, voire impossible, toute réconciliation entre la France et l’Algérie ».
« Paradoxe français »
Le Courrier d’Algérie considère que le ministre est marginalisé au sein du gouvernement. Selon le quotidien, l’Élysée, Matignon et le Quai d’Orsay s’accorderaient pour tenir Retailleau « à l’écart du dossier avec l’Algérie », soulignant qu’« à chaque fois que l’Algérie et la France retrouvent un tantinet d’apaisement », il serait celui « qui met les pieds dans l’assiette ».
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