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Algérie / Déportation inhumaine: ≃ 3 000 migrants subsahariens renvoyés dans le désert en 10 jours


Les autorités algériennes ont expulsé 2 852 migrants entre le 23 février et le 5 mars. Les exilés ont été abandonnés en plein désert, à plusieurs kilomètres de la frontière nigérienne, sans eau ni nourriture. Parmi eux, des femmes et des enfants.

Ils ont été abandonnés en plein milieu du désert, sous un soleil de plomb, sans eau ni nourriture. En seulement 10 jours, 2 852 personnes originaires d’Afrique subsaharienne ont été expulsées d’Algérie vers la frontière nigérienne. Selon Alarme Phone Sahara, qui vient en aide aux exilés dans la région, 993 migrants ont été renvoyés le 23 février, 1 180 le 3 mars et 679 le 5 mars. Parmi eux se trouvaient des femmes et des enfants. L'Organisation internationale pour les migrations (OIM), jointe par InfoMigrants, n'a pas été en mesure de confirmer ces chiffres.

Selon les Nations unies, Alger a procédé à l'expulsion de dizaines de milliers de migrants irréguliers originaires d'Afrique de l'Ouest et centrale depuis 2014.

"Campagne malveillante"

En juin 2022, l'organisation Médecins sans frontières (MSF) avait dénoncé "les traitements inhumains" infligés à des migrants ouest-africains cherchant à gagner l'Europe et dont "environ 2 000" sont "en moyenne mensuellement" refoulés de l'Algérie vers le Niger voisin. MSF a recensé 23 171 migrants expulsés en 2020 et 27 208 autres en 2021.

L'Algérie socialiste, qui prône l'amitié entre les peuples, ne reconnaît jamais ces expulsions. Alger, qui n'a pas de législation en matière d'asile, a souvent démenti ces accusations, dénonçant une "campagne malveillante".

Chaque année, des milliers de migrants subsahariens sont déportés de force par l'Algérie et abandonnés en plein milieu du Sahara. Ils arrivent blessés et épuisés après avoir été dépouillés par la police algérienne!

Ces opérations sont appelées sobrement des "reconduites à la frontière" par les autorités algériennes. Interpellés dans différentes villes du nord de l’Algérie, dans leur appartement, leur travail ou dans la rue, les migrants sont ensuite entassés dans des camions puis déportés vers le centre de refoulement de Tamanrasset, à 1 900 kilomètres de route au sud d’Alger. Là, beaucoup affirment être dépouillés de leurs affaires par les policiers: argent liquide, bijoux, téléphones portables, passeports…

Ensuite, les exilés sont abandonnés dans le désert, au lieu-dit du Point-Zéro, qui marque la frontière avec le Niger, en plein Sahara.

Les migrants "ne reçoivent ni nourriture ni d’endroit pour dormir"

Livrés à eux-mêmes, les exilés doivent marcher des heures pour atteindre le premier village nigérien, Assamaka, à 15km du Point-Zéro. C’est là que se trouve le centre de transit de l’OIM, le bras de l’ONU qui assiste les retours volontaires des migrants vers leur pays d’origine.

"Elles [les autorités algériennes, ndlr] nous ont abandonnés en plein désert, au milieu de la nuit. Il était environ 3h du matin quand on s'est mis en marche vers les lumières qui scintillaient. Je portais ma fille Maryam, ma femme portait Aminata, et un frère portait mes bagages", avait raconté en novembre dernier à InfoMigrants Burlaye, un père de famille malien de 25 ans qui travaillait comme boulanger en Algérie avant son expulsion.

Lui et ses proches n’ont pas pu être accueilli dans le camp de l’agence onusienne, qui affichait ce jour-là complet. Burlaye, sa femme et ses enfants ont passé plusieurs nuits dehors.

C’est aussi le cas des migrants renvoyés par l’Algérie ces dernières semaines. D'après Alarme Phone Sahara, nombre d’entre eux ont dû rester à l’extérieur, faute de places dans le centre de l’OIM. Ils "ne reçoivent ni nourriture, ni d’endroit pour dormir. Ils sont contraints de vivre dans la rue", a déclaré le 10 mars l’organisation sur sa page Twitter.

"Abandon" de milliers de migrants

Dans un communiqué publié jeudi 16 mars, Médecins sans frontières (MSF) a dénoncé "l'abandon" de milliers de migrants présents à Assamaka. L'ONG médicale parle même d'une "situation sans précédent".

Le Centre de santé intégré (CSI) d'Assamaka, dans lequel MSF "distribue des articles non alimentaires" et propose des "consultations gratuites" de santé, est "débordé". "La majorité des personnes récemment arrivées se sont installées dans l'enceinte du CSI, en raison du manque d'espace dans le centre de transit", affirme une coordinatrice de MSF à Agadez, Schemssa Kimana, citée dans le communiqué.

MSF ajoute que des personnes "cherchent à s'abriter de la chaleur" qui peut "atteindre 48°C" à Assamaka, jusqu'à dormir dans des "tentes de fortune", "devant la maternité, sur le toit ou dans la zone de déchets". Dans les endroits "peu hygiéniques", ces personnes sont exposées "à des risques sanitaires tels que les maladies contagieuses et les infections cutanées", indique l'ONG.

Les expulsions opérées par les autorités algériennes sont fréquentes dans la région. Le 12 février déjà, 899 personnes avaient été renvoyées à la frontière nigérienne, dans les mêmes conditions. Selon les chiffres de MSF, entre le 11 janvier et le 3 mars 2023, près de 5 000 migrants ont connu le même sort. Et pour certains, l’issue peut être fatale. Nombre d’exilés, livrés à eux-mêmes dans le désert, sans carte ni moyen de localisation, se perdent et errent plusieurs jours à la recherche d'un village. En 2020 et 2021, 38 corps ont été retrouvés dans la zone, à quelques kilomètres d’Assamaka.

Les révélations d'Amir DZ à propos des dossiers Turcs en Algérie.

Pour la petite histoire, il y a eu plusieurs descentes de la gendarmerie nationale dans les chantiers turcs, où elle a découvert des centaines de subsahariens sans papiers, dont des mineurs. Des descentes qui se sont soldé par des affrontements, comme celle qui s'est récemment passé à Zaataria à Mahelma près de la capitale.

Les entreprises turques n'ont pas été sanctionnées car devenues incontournables, alors que ce sont les travailleurs subsahariens qui sont persécutés par les Turcs qui les renvoient vers les États frontaliers. Mentionnons ici un point important. La plupart des raids effectués par la gendarmerie nationale ont été effectués à la demande des Turcs eux-mêmes afin qu'ils ne paient pas les cotisations et les salaires des subsahariens, qui se chiffrent en milliards.

Des pots-de-vin sont versés au commandant de la gendarmerie nationale pour opérer des descentes dans ces chantiers afin de procéder à l’arrestation de travailleurs subsahariens et l’expulsion d'autres, comme mentionné précédemment.

Il y a lieu de rappeler que la loi algérienne sur les marchés publics interdit à toute entreprise étrangère de confier les travaux qu'elle a acquis à une autre entreprise étrangère. Cette opération doit être confiée à une entreprise algérienne et prévoit l'emploi de travailleurs algériens. Mais le ministère du Travail ne fait aucun contrôle et n'applique pas la loi aux entreprises turques, parce qu’il a été corrompu et a surtout reçu des recommandations de très haut.

Remarque : Il convient de noter que de nombreux travailleurs subsahariens ont été tués et ont été enterrés dans le plus grand secret.
Réaction de l'Entreprise Turque Atlas Génie Civil Company SPA, juste après la publication de ses révélations

En droit algérien, l’immigration clandestine est strictement contrôlée et sévèrement punie par la loi 08-11 relative aux conditions d’entrée, de séjour et de circulation des étrangers en Algérie, de même que l’emploi des étrangers est soumis à des conditions strictes telles que l’absence de qualification de la main-d’œuvre nationale et la délivrance d’un permis de travail ou d’une autorisation temporaire de travail.

La Loi n° 81-10 relative aux conditions d’emploi des travailleurs étrangers organise strictement l’employabilité des étrangers sur le territoire national.

À ce titre, il est possible de distinguer trois catégories de travailleurs étrangers :

  • Les travailleurs étrangers protégés par une Convention ou un Traité conclu entre l’Algérie et un pays étrangers : ceux-là ne sont pas soumis à la condition de disposer d’un quelconque permis pour exercer un travail sur le territoire du pays d’accueil ;

  • Les personnes ayant le statut de réfugié politique : ces personnes sont dotées de la protection que leur confère le statut de réfugiés conformément au droit international humanitaire ;

  • Les autres travailleurs, recrutés en raison de leur qualification dont ne disposent pas les nationaux : ceux-là doivent être en possession d’un permis ou d’une autorisation temporaire de travail, délivrés sur des conditions strictes, par l’autorité compétente, conformément à la loi.

En vertu d’une Directive européenne de 2009, les sanctions contre l’emploi des migrants en situation irrégulière vont plutôt dans le sens de la régularisation de la situation des travailleurs migrants, tel le paiement obligatoire de toute rémunération due aux travailleurs et de toutes les taxes et cotisations de sécurité sociale dont l’employeur se serait acquitté si le ressortissant du pays tiers avait été employé légalement. Des sanctions pénales peuvent néanmoins être prononcées dans certains cas.

A l’inverse, le droit algérien prévoit essentiellement des sanctions pénales aussi bien pour l’employeur qui procède au recrutement de travailleurs étrangers en violation de la loi, que pour l’étranger qui séjourne en Algérie et y travaille clandestinement.

L’article 28 de la Loi 08-11 organisant le séjour des étrangers en Algérie impose à toute personne physique ou privée qui emploie un étranger d’en faire la déclaration aux services administratifs compétents dans un délai de 48 heures. Les mêmes formalités doivent être accomplies lors de la rupture de la relation de travail. L’employeur doit aussi être en mesure de présenter sur réquisition des agents habilités, les pièces et documents autorisant l’emploi des étrangers dans son établissement.

Ainsi, en cas de non déclaration auprès des services compétents, ou en cas d’absence des justificatifs de recrutement d’étrangers lors d’une réquisition, la responsabilité de l’employeur est engagée.

Les dispositions de la loi sont toutefois équivoques s’agissant des peines encourues. L’article 19 de la Loi 81-10 relative aux conditions d’emploi des travailleurs étrangers, modifiée et complétée par la loi de finances complémentaire de 2015, réserve une peine plutôt légère pour l’employeur d’un travailleur étranger soumis à l’obligation du permis de travail ou à l’autorisation temporaire de travail, ce dernier encourant une amende de 10 000 à 20 000 dinars algériens (DA).

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