Sahel: Déstabilisation, "complicité" les terroristes, ingérence... Les agressions de l'algérie contre le Mali sont intarissables... [Dossier]
- gherrrabi
- 26 juil.
- 14 min de lecture

Depuis deux ans, les données relatives à la situation au Sahel sont particulièrement alarmantes : nombre de morts, de réfugiés, de déplacés internes, d’enfants déscolarisés, expansion du champ d’action des groupes terroristes, instabilité politique au Mali, au Burkina Faso et au Niger…
Mali - une nouvelle «Charte pour la paix et la réconciliation»
Au Mali, le projet de nouvelle Charte nationale pour la paix et la réconciliation a été remis cette semaine au président de transition, le général Assimi Goïta. Un texte censé « panser les blessures profondes laissées par des années de crises multiformes » et « jeter les bases d’un Mali apaisé, uni et tourné vers l’avenir », selon la présidence.
Le texte complet n'a pas encore été publié. Il devrait l'être sous peu, après son adoption par le Conseil national de transition et sa promulgation par le chef de l'État. Mais d'après les fuites auxquelles RFI a pu avoir accès, son champ est très vaste : ses 106 articles parlent de justice, d'économie, de gouvernance, d'éducation, de lutte contre la corruption... Surtout, le texte « souligne la nécessité de résoudre les crises et les conflits en privilégiant les modes alternatifs et les mécanismes endogènes ». En clair, sans facilitation ou sans ingérence, selon les points de vue, étrangère.
«Concertation et inclusivité»
La nouvelle charte a été « élaborée dans un esprit de concertation et d’inclusivité », se félicite la présidence. Lors de la remise du projet de charte, le général Assimi Goïta a même souligné « le caractère participatif du processus », sous les applaudissements nourris des participants. Si des représentants de l'État et des collectivités, des organisations professionnelles, des syndicats ou des religieux ont bien été associés
Le Mali enterre définitivement la page des accords d’Alger
Ce mardi 22 juillet, le Mali a définitivement tourné la page des accords d’Alger de mai 2015. Ces accords sont désormais remplacés par la Charte nationale de paix et de réconciliation, élaborée après plusieurs mois de consultations entre les militaires au pouvoir depuis août 2020, les partis politiques et les mouvements de la société civile.
Cette nouvelle loi fondamentale met également fin à tous les accords précédents négociés sous médiation algérienne. «Il s’agit notamment de l’Accord de Tamanrasset de 1991, du Pacte national de 1992 et de l’Accord d’Alger pour la restauration de la paix, la sécurité et le développement dans la région de Kidal de juillet 2006», a précisé dimanche le Premier ministre Abdoulay Maiga.
L’annonce de cette rupture officielle avec l’Algérie survient quelques jours après les discussions à Bamako entre le président Assimi Goïta et Rudolph Atallah, membre de l’administration Trump en charge de la lutte antiterroriste. Ce dernier a mené une délégation de responsables sécuritaires dans la capitale malienne.
Pour rappel, le gouvernement de transition au Mali avait annoncé le 25 janvier 2024 son retrait unilatéral des accords d’Alger, soit quatre semaines après l’adhésion du Mali à une initiative lancée le 6 novembre 2023 par le roi Mohammed VI, visant à faciliter l’accès des pays du Sahel à l’océan Atlantique.
Pour mémoire, le souverain a reçu, le 28 avril 2025, les ministres des Affaires étrangères de l’Alliance du Sahel, formée en septembre 2023 par le Mali, le Niger et le Burkina Faso.
Bamako accuse Alger de "complicité" avec des groupes terroristes et d'ingérence dans ses affaires intérieures.?

Saisie d’une importante quantité de matériels destinés aux terroristes (Etat-major)
L’Etat-major général des armées maliennes informe, dans un communiqué, ce mardi 22 juillet 2025, que les Forces armées maliennes (FAMa), en collaboration avec les forces amies de l’AES, ont saisi une importante quantité de matériels destinés à une organisation terroriste.

20 canoës pneumatiques avec leur appareil de recharge, 4 000 turbans, 3 280 paires de rangers, 4 000 tenues tréllis, 100 tenues couleur kaki, 4 040 macarons avec inscription du groupe terroriste, 1 040 écussons avec l’inscription du groupe terroriste, 20 cartons de chandail : telle est la composition du matériel destinés aux terroristes que l’armée malienne a intercepté.
Selon les explications de l’état-major des armées maliennes, «ces équipements ont été confectionnés dans un pays d’Asie puis expédiés dans un pays de la sous-région».
«Cette saisie a été possible grâce à une parfaite coordination entre les services de renseignements des pays de la Confédération des États du Sahel (AES), appuyés par un pays frère», précise le communiqué de l’armée malienne. Pour l’état-major général des Armées maliennes, cela témoigne «si besoin en était, l’implication d’entités étrangères dans le soutien aux groupes terroristes». A cet effet, le communiqué assure que «des enquêtes ont été immédiatement diligentées» par les structures judiciaires compétentes en vue de faire toute la lumière sur cette énième tentative de déstabilisation des pays de l’AES.

Le Mali 🇲🇱accuse directement l'Algérie d'exporter le terrorisme partout au Sahel
Ancien pays "médiateur pour la paix" dans la partie nord du Mali, confrontée à une rébellion touareg, l’Algérie est accusée par Bamako de soutenir les « groupes terroristes ».
Le Mali a dénoncé mercredi 1er janvier « la persistance des actes d’ingérence » de l’Algérie voisine, ancien pays médiateur pour la paix dans sa partie nord confrontée à une rébellion touareg, que Bamako accuse de soutenir les « groupes terroristes », dans un communiqué.
Le ministre des affaires étrangères malien, Abdoulaye Diop, précise « avoir appris par voie de presse les propos » du chef de la diplomatie algérienne, Ahmed Attaf, « commentant à nouveau la stratégie malienne de lutte contre le terrorisme », dans ce communiqué qui ne reproduit pas les propos incriminés, attribués à M. Attaf.
Le ministère dit avoir déjà dénoncé « la proximité et la complicité de l’Algérie avec les groupes terroristes qui déstabilisent le Mali et à qui elle a offert le gîte et le couvert ». Il « condamne avec la dernière vigueur cette nouvelle ingérence de l’Algérie dans les affaires intérieures du Mali ».
Bamako « rappelle que les options stratégiques pour la lutte contre les groupes armés terroristes, soutenus par des sponsors étatiques étrangers, relèvent exclusivement de la souveraineté du Mali » et de ses voisins burkinabé et nigérien avec qui le Mali a créé une confédération après avoir fait sécession de la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cedeao), jugée inféodée à la France. Il invite Alger « à cesser de faire du Mali un levier de son positionnement international ».
Le Premier ministre malien Abdoulaye Maïga ne mâche pas ses mots. Il a dénoncé les «sponsors étatiques étrangers» responsables, selon lui, de l’embrasement terroriste au Sahel, avec cette formule choc : «Les pays du Sahel font face depuis une décennie à un terrorisme qui leur a été imposé, caractérisé par une implication avérée de sponsors étatiques étrangers». Si le nom de l’Algérie n’a pas été prononcé, tous les regards se sont tournés vers la délégation algérienne.
Dans la nuit du 31 mars au 1er avril 2025, un drone militaire malien s’est écrasé. L’incident a rapidement donné lieu à des déclarations officielles contradictoires et à une revendication de groupe armé, sans qu’aucune confirmation indépendante ne permette, à ce stade, de trancher sur les circonstances exactes.

Imbroglio autour de la destruction d’un drone militaire malien à la frontière algérienne. Dans un communiqué publié le 1er avril, l’État-Major Général des Armées maliennes a affirmé qu’«un aéronef sans pilote appartenant aux FAMa s’est écrasé à proximité de Tinzaouatene, dans la région de Kidal», au cours d’«une mission ordinaire de surveillance du territoire ». L’appareil, selon le communiqué parvenu à lafrique-adulte.com, aurait touché le sol dans une zone inhabitée, sans faire de victimes ni de dégâts matériels. Les dispositifs de sécurité embarqués auraient également permis d’éviter toute explosion. Une enquête a été ouverte pour établir les causes de l’incident.
L’Affaire du Drone Révèle les Dessous de la Protection d’Iyad Ag Ghali

Quelques heures plus tard, le ministère algérien de la Défense annonçait avoir «abattu un drone armé de reconnaissance» dans la même nuit, après que l’appareil a pénétré «de deux kilomètres» dans l’espace aérien algérien. Le tir a été effectué par une unité de la Défense aérienne territoriale de la 6e Région militaire. Le communiqué algérien ne précise pas l’origine de l’engin, mais présente l’opération comme un «acte de vigilance et de protection du territoire national».

«Dans le cadre des efforts consentis pour préserver nos frontières nationales, une unité relevant de Défense Aérienne du Territoire en 6ème Région Militaire, la soirée d’hier le 1er avril 2025, vers minuit, a réussi à la détection et la destruction d’un drone de reconnaissance armé, à proximité de la ville frontalière de Tin-Zaouatine en 6ème Région Militaire, après avoir pénétré l’espace aérien sur une distance de deux kilomètres», a précisé le MDN.
Le MDN assure que cette «opération de qualité confirme, une nouvelle fois, la grande vigilance et la disponibilité permanente des unités de l’Armée Nationale Populaire de préserver nos frontières terrestres, aériennes et navales, de toute menace qui porte atteinte à la souveraineté nationale.»

Le site spécialisé algérien menadefense.net, géré par Akram Kharief
Akram Kharief est un journaliste algérien qui se concentre sur les questions de défense et de sécurité dans la région de l'Afrique du Nord. Il est propriétaire du média en ligne MENADEFENSE, qui couvre les conflits et les acquisitions de défense dans la région.
L'algérien, Akram Kharief, propriétaire du média en ligne MENADEFENSE et proche de la junte militaire algériene, annonce que, l'armée algérienne avait abattu un drone malien de type Akinci.

Quelques heures plus tard, le communiqué a été retiré de la page officielle du Ministère de la Défense Nationale algérien


Dans le même intervalle, un troisième acteur est entré en scène. Le Front de Libération de l’Azawad (FLA), groupe armé actif dans le nord du Mali, a revendiqué la destruction d’un drone de type Akinci, acquis récemment par les FAMa auprès de la Turquie.
Sur les réseaux sociaux, des comptes affiliés au mouvement ont diffusé plusieurs images montrant des débris d’un appareil non identifié, surmontés d’un drapeau du FLA. Aucune vérification indépendante n’a permis de confirmer ni l’authenticité de ces images, ni l’identité exacte de l’engin concerné.

Le même site algérien menadefense.net annonce qu'un drone lourd Baykar Akinçi appartenant aux forces maliennes a été abattu hier, selon le porte parole du Front de Libération de l’Azawad, par une unité du FLA alors qu’il survolait la vile frontalière de Tinzawatene à quelques encablures de l’algérie.

La réponse appropriée du Mali à l’agression algérienne (communiqué)
En réponse à la destruction, dans la nuit du 31 mars au 1er avril 2025, d’un drone malien par l’Algérie, le Gouvernement de la Transition au Mali a décidé de Convoquer l’Ambassadeur algérien pour protester contre l’hostilité du régime algérien; Se retirer avec effet immédiat du Comité d’Etat-Major Conjoint (CEMOC); Porter plainte, devant des instances internationales, contre le régime algérien, pour actes d’agression. Communiqué.



Le Mali ouvre une information judiciaire
Après le rappel des ambassadeurs des pays de l'Alliance des Etats du Sahel (AES) en poste à Alger, le Mali a décidé de poursuivre le bras de fer avec l'Algérie. Toujours en réaction à l'abattage d'un drone malien près de la ville frontalière de Tinzaouatine, au sud du pays de l'Algérie par les formes armées de ce pays.Dans un communiqué, le procureur de la République du pôle judiciaire spécialisé de lutte contre le terrorisme et de la criminalité transnationale organisée a informé de l'ouverture d'une information judiciaire.
Cette information judiciaire, selon Amadou Bocar Toure, procureur de la République, porte sur « des faits d'association de malfaiteurs, d'actes de terrorisme, de financement du terrorisme, de détention illégale d'armes de guerre et de munitions et de complicité».
Le justice malienne entend donc faire la lumière sur ces faits afin « d'identifier et d'interpeller les présumés auteurs, coauteurs et complices pour qu'ils répondent de leurs actes ».
« Le procureur de la République communiquera en temps opportun sur les éléments issus des diligences qui seront menées et en appelle à la collaboration de la population pour apporter toutes informations utiles à ses services en lien avec les autres services compétents », souligne le communiqué.

Une opération orchestrée par la DGDSE
Les circonstances précises de l’incident du 1er avril 2025 prennent désormais une nouvelle dimension. La version selon laquelle la Direction Générale de la Documentation et de la Sécurité Extérieure (DGDSE) algérienne aurait orchestré cette opération gagne en crédibilité.
Selon les informations disponibles, la DGDSE aurait reçu dans la nuit du 31 mars au 1er avril 2025 une alerte d’un agent en poste au Mali : l’armée malienne avait identifié le campement d’Iyad Ag Ghali dans la région de Tinzaouatène et préparait une opération imminente pour le neutraliser.
Face à l’urgence de la situation et l’impossibilité pour Iyad Ag Ghali de se replier rapidement vers le nord en territoire algérien, le Directeur de la DGDSE, le général Rochdi Fethi Moussaoui, aurait ordonné directement au commandement des forces aériennes de la 6ème région militaire d’intercepter le drone malien avant qu’il ne puisse accomplir sa mission.
Ce scénario expliquerait pourquoi les autorités algériennes cherchent aujourd’hui à faire porter la responsabilité de l’incident sur des officiers régionaux, alors que la décision aurait été prise à un niveau bien supérieur.
Iyad Ag Ghali : un « actif » précieux pour l’Algérie
Le parcours d’Iyad Ag Ghali et ses relations avec les services algériens permettent de comprendre pourquoi sa protection représente un enjeu stratégique pour certains cercles du pouvoir à Alger.
Né en 1958 à Boghassa dans le nord du Mali, Iyad Ag Ghali s’est d’abord fait connaître comme leader des rébellions touarègues des années 1990. C’est à cette époque que ses liens avec les services algériens se sont noués, comme le rappelait Jean-Pierre Filiu le 21 octobre 2018 : « Alors qu’il dirige en 1990 une guérilla touareg d’inspiration nationaliste, le Département du renseignement et de la sécurité (DRS) parraine à Tamanrasset sa réconciliation avec des représentants de Bamako. »
Après son basculement dans le jihadisme en 2012 avec la création d’Ansar Dine, puis en 2017 avec la formation du Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM), ces liens semblent s’être maintenus. Comme le notait Jean-Pierre Filiu : « Même après son basculement jihadiste de 2012, les responsables algériens sont convaincus qu’ils peuvent jouer Ansar Eddine contre AQMI, et limiter ainsi les effets de la déstabilisation du Nord-Mali sur leur propre territoire. »
Cette relation complexe explique pourquoi, malgré le mandat d’arrêt émis par la Cour pénale internationale contre lui pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité, Iyad Ag Ghali a pu échapper aux multiples tentatives de capture ou d’élimination.
L’enquête du journal Le Monde publiée en juillet 2018 révélait d’ailleurs que « les services lancés sur la trace d’Iyad Ag-Ghali l’avaient souvent signalé dans la localité algérienne de Tin Zaouatine, à la frontière du Mali, où résiderait sa famille. » Plus troublant encore, le même article affirmait que le chef jihadiste, « hospitalisé dans un établissement algérien de Tamanrasset, y aurait échappé en 2016 à une tentative occidentale de neutralisation. »
Une stratégie algérienne de plus en plus intenable
La mise en cause de deux officiers supérieurs dans l’affaire du drone révèle les contradictions de la politique algérienne au Sahel. D’un côté, Alger se présente comme un acteur clé de la lutte antiterroriste et un médiateur incontournable dans les crises régionales. De l’autre, certains cercles du pouvoir maintiennent des relations ambiguës avec des chefs jihadistes comme Iyad Ag Ghali.
Cette stratégie, longtemps tolérée par les partenaires occidentaux et africains, est aujourd’hui frontalement contestée par le Mali et ses alliés de l’Alliance des États du Sahel. L’accusation formelle de « parrainage du terrorisme international » portée par Bamako contre Alger marque un tournant dans les relations sahéliennes.
Il faut rappeler que la Cour pénale internationale avait levé les scellés du mandat d’arrêt émis contre Iyad Ag Ghali. Comme le rapportait un article du 360 en juin 2023, la CPI avait demandé au greffier « de préparer une demande de coopération pour l’arrestation et la remise du suspect, et de l’adresser aux autorités compétentes de tout État pertinent » – une formulation qui visait manifestement l’Algérie.
La manœuvre judiciaire contre les deux officiers algériens pourrait donc s’interpréter comme une tentative de préserver l’image internationale de l’Algérie, tout en maintenant sa politique de protection envers Iyad Ag Ghali.
Les répercussions régionales d’une crise majeure
Cette crise survient dans un contexte de reconfiguration profonde des équilibres sahéliens. Le Mali, le Burkina Faso et le Niger, unis au sein de l’Alliance des États du Sahel, ont diversifié leurs partenariats sécuritaires, notamment avec la Russie, et acquis des capacités militaires avancées comme les drones turcs Baykar Akıncı.
Le rappel « pour consultations » des ambassadeurs des trois pays de l’AES accrédités à Alger, le retrait du Mali du Comité d’État-Major Opérationnel Conjoint (CEMOC), l’annonce d’une plainte internationale et l’ouverture au Mali d’une procédure judiciaire pour « association de malfaiteurs, actes de terrorisme, financement du terrorisme, détention illégale d’armes de guerre, de munitions et de complicité », témoignent de la détermination de ces pays à s’affranchir de l’influence algérienne.
Pour l’Algérie, cette crise représente un défi majeur à sa politique régionale. La publicité donnée à ses liens présumés avec Iyad Ag Ghali et le sacrifice apparent de deux hauts gradés pour masquer une opération sensible révèlent les contradictions d’une stratégie de plus en plus difficile à maintenir.
Quant à Iyad Ag Ghali lui-même, sa situation devient de plus en plus précaire. Même avec la protection algérienne, l’intensification des opérations maliennes et la sophistication croissante de leurs moyens militaires rendent sa position vulnérable. Le communiqué malien précisait d’ailleurs que « d’importantes cibles terroristes ont été frappées avec succès dans la localité de Tinzawatène » dans les heures suivant l’incident du drone.
Cette affaire pourrait ainsi marquer un tournant décisif dans la lutte contre le terrorisme au Sahel, en mettant en lumière les responsabilités des États dans la persistance de la menace jihadiste et en poussant à une redéfinition des alliances régionales.
Drone abattu, ciel fermé : l’escalade s’intensifie entre Alger et Bamako

Une nouvelle ère de tensions s’installe entre l’Algérie et les États du Sahel, après l’épisode explosif de la destruction d’un drone malien par les forces armées algériennes. L’Algérie rajoute à la provocation : elle annonce, à compter de ce lundi, la fermeture totale de son espace aérien à tous les vols civils et militaires en provenance ou à destination du Mali, invoquant des « incursions répétées et inacceptables » de l’appareil militaire malien sur son territoire.
Dans un communiqué publié dans la matinée, le ministère algérien des Affaires étrangères justifie cette décision par la nécessité de « protéger la souveraineté de l’espace aérien national, face à des actes provocateurs et contraires aux usages diplomatiques ». L’Algérie affirme en effet que le drone malien abattu dans la nuit du 31 mars au 1er avril se trouvait « bien à l’intérieur de la frontière algérienne », ce que les autorités de Bamako réfutent catégoriquement.
En parallèle, Alger a rappelé pour consultation ses ambassadeurs accrédités au Mali, au Niger et au Burkina Faso, signant un tournant radical dans ses relations avec les pays de l’Alliance des États du Sahel (AES). Ce geste diplomatique fort intervient alors que Bamako, Niamey et Ouagadougou accusent l’Algérie de soutenir indirectement les mouvements armés opérant dans la région frontalière.
Fait notable : la riposte n’a pas tardé. Les trois capitales sahéliennes, agissant de concert, ont annoncé dans la foulée le rappel immédiat de leurs ambassadeurs accrédités à Alger. L’AES, à travers une déclaration commune, dénonce un « acte d’hostilité caractérisé » de la part de l’Algérie et condamne « une manœuvre d’isolement diplomatique inadmissible à l’encontre de peuples en lutte contre le terrorisme transfrontalier ».
Une escalade aux allures de rupture
Cette crise trouve son origine dans la chute, le 1er avril, d’un drone de l’armée malienne dans la région de Tinzaouatène, à proximité de la frontière algérienne. Tandis qu’Alger affirme qu’un drone malien a violé son espace aérien, Bamako affirme disposer de preuves formelles que l’appareil n’a jamais quitté le territoire malien. Dans un communiqué officiel n°073, le Gouvernement de la Transition au Mali accuse frontalement l’Algérie :
« Le régime algérien, en plus de servir de base arrière aux groupes terroristes, s’engage aujourd’hui dans la lutte armée pour perpétrer des agressions contre un État voisin, en vue de protéger ses supposés terroristes ».
Le ton est sans appel, et cette prise de position fait écho à une série d’accusations similaires portées ces derniers mois par les pays de l’AES, qui soupçonnent l’Algérie de jouer un double jeu dans la crise sécuritaire sahélienne. L’hostilité d’Alger serait, selon eux, motivée par un agenda géopolitique dépassé, dans lequel l’Algérie tente désespérément de maintenir un rôle de puissance tutélaire au Sahel – un rôle que lui contestent désormais ouvertement ses voisins.
Pour de nombreux observateurs, la fermeture unilatérale de l’espace aérien marque non seulement une escalade militaire et diplomatique, mais aussi un signal : Alger veut reprendre l’initiative dans une région où elle a perdu de son influence. Depuis l’émergence de l’AES, l’Algérie a vu son rôle traditionnel de médiateur dans les crises sahéliennes marginalisé. Les critiques récurrentes sur son inaction face aux groupes armés dans le sud algérien, et les échecs répétés de l’Accord d’Alger, ont achevé de discréditer sa posture régionale.
À présent, en fermant son ciel et en rappelant ses diplomates, Alger semble parier sur une stratégie de confrontation directe. Mais cette posture pourrait se retourner contre elle. Car dans le même temps, le Mali, le Niger et le Burkina Faso renforcent leur solidarité, dénonçant une politique « belliqueuse, paternaliste et anachronique » de la part du régime algérien.
Cette montée en tension survient dans un contexte international tendu, où la lutte contre le terrorisme sahélien nécessite une coopération renforcée entre États riverains. Or, le retrait de l’Algérie de cette coopération – voire son obstruction active, selon les mots de Bamako – pourrait placer Alger dans une position d’isolement régional inédite.
À Bamako, le ton se veut ferme mais déterminé : « Le Mali poursuivra ses opérations de sécurisation de son territoire, quelles que soient les menaces ou les obstacles ». Et à Niamey comme à Ouagadougou, les discours soulignent une volonté commune de s’affranchir des anciennes tutelles, qu’elles soient occidentales ou régionales.



