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MI6 / Omar_Radi_Gate (007): l’espionnage économique et/ou industriel

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  • 20 juil. 2020
  • 10 min de lecture

Dans la guerre de l’espionnage économique, tous les coups sont donc permis. Et même l’un des plus fameux secrets industriels n’est pas à l’abri.  Les histoires d’agents secrets, ce n’est pas que du cinéma. Quand la réalité dépasse la fiction, certaines affaires d’espionnage sont dignes des meilleurs scénarios.

Il existe toujours une confusion des genres très prégnante dans les médias, entre les pratiques dites d’intelligence économique, et les affaires qui relèvent de l’espionnage ?

L’intelligence économique, portant aussi le nom de veille technologique ou de business intelligence, est le fait, pour une entreprise, d’être en éveil à l’évolution des évènements dans le monde. Le but est donc de récolter, à travers la planète, tout ce qui se publie sur un sujet et qui permettrait ainsi à une entreprise de se trouver à la pointe de la technologie. Le concept d’Intelligence économique (business intelligence) fait penser à un quelconque espionnage. A contrario, L’espionnage qu’est-ce au juste?  Dérivé malsain de l’intelligence économique, l’espionnage de sa dimension de “renseignement stratégique” cherche à obtenir par des moyens répréhensibles (corruption, piratage, vols de documents, écoutes téléphoniques…) les informations que l’on n’a pas pu ou su obtenir par des voies officielles. Nous aurions alors affaire un à vol caractérisé, à des fins d’espionnage ?. En effet, c’est du vol. C’est interdit, illégale et puni par la loi. On entre immédiatement ici en « zone rouge » qui n’est bien entendu plus du ressort de l’intelligence économique, mais bien le fait de cette pratique délictueuse qu’est l’espionnage.

Affaire Omar Radi: l’espionnage économique et/ou industriel

Preuves:

Courriel adressé par Clive Dare Newell à Omar Radi.

Dans ce courriel, Clive DareNewell écrit à Omar Radi qu’il ne «l’a pas sollicité pour recueillir des informations open source (source ouverte), en précisant qu’il est parfaitement en mesure d’accomplir seul cette tâche». L’expéditeur précise davantage son propos en le soulignant pour en montrer le caractère focal: «je veux savoir dans quelle mesure vous pouvez collecter des informations auprès de sources humaines». Quand c’est un officier, qui a fait toute sa carrière dans le renseignement, qui formule une requête de cette façon, cela s’apparente fortement à un travail de renseignement.

Lors d’une conférence de presse organisée, le 15 juillet, au siège du syndicat de la presse nationale, Omar Radi a affirmé qu’il a collaboré avec «l’officier» (c’est ainsi qu’il l’a désigné) Clive DareNewell, mais que ce dernier ne travaille plus pour MI6 depuis 2011, date à laquelle il a pris sa retraite.


Cette affaire montre que les informations stratégiques sensibles sont devenues des denrées convoitées et que, pour les obtenir, toutes les méthodes sont bonnes. Au Maroc on ne badine pas avec l’espionnage. Le signal est fort et le message limpide: la protection des entreprises marocaine est une affaire d’État.

Conserver et chérir cette « culture du combat » et de la protection du patrimoine immatériel de nos fleurons industriels, mais aussi de nos PME, PMI et TPE innovantes. Il en va de la santé de notre économie et finalement, de notre survie collective. La moindre fuite d’informations peut coûter très cher.

En quête de réponse à plusieurs questions qui se posent:
  1. Quels sont nos entreprises victimes de cet espionnage?;

  2. Quels sont les Etats ou les parties bénéficiaire de cet espionnage?

  3. Quelle est l’étendue des dégâts?…

L’espionnage économique et industriel: les affaires qui ont fait trembler 

En 2013, James Clapper, le directeur du renseignement américain, pouvait encore berner quelques naïfs quand il déclarait : «Ce n’est pas un secret que les services collectent des informations sur des questions économiques et financières. Ce que nous ne faisons pas, c’est utiliser nos capacités de surveillance de l’étranger pour voler des secrets commerciaux et les donner à des entreprises américaines afin d’accroître leur compétitivité.» Mais aujourd’hui, après les nombreuses révélations de WikiLeaks, plus personne ne peut le croire. Car, oui, les Etats-Unis, mais aussi la plupart des Etats, utilisent bien leurs services de renseignements respectifs pour mener la bataille la plus importante du moment : la guerre économique. Tout comme certaines entreprises, qui n’hésitent pas non plus à dérober des secrets industriels pour remporter des marchés ou encore abattre la concurrence.

En juillet 2015, on apprenait ainsi que depuis 2006 les Etats-Unis espionnaient le gouvernement japonais, le gouverneur de la Banque centrale, mais aussi des entreprises nippones comme la division gaz de Mitsubishi. Une opération baptisée «Target Tokyo», visant en tout 35 cibles importantes et qui, selon WikiLeaks, aurait permis aux Etats-Unis d’avoir une «connaissance intime» des positions du Japon sur plusieurs dossiers majeurs, dont sa politique sur le changement climatique. Une révélation qui a jeté un froid entre les deux pays, en pleines négociations autour du traité transpacifique.

Dans cette guerre que se livrent les Etats et les entreprises, tous les secteurs économiques sont touchés, mais les espions industriels ont tout de même des terrains de chasse favoris.

On se souvient par exemple du Concorde, fierté tricolore, qui a été copié, sans jamais être égalé, en particulier par l’URSS. Dans les années 1960 et 1970, la fabrication du Tupolev TU-144 a été possible grâce à un pillage industriel à très grande échelle qui s’est étalé sur plus d’une décennie. Sergei Pavlov, le patron de la compagnie soviétique Aeroflot à Paris, a été arrêté en 1965 avec dans sa mallette les plans détaillés des systèmes de freinage, du train d’atterrissage ainsi que de la cellule du Concorde. En 1977, c’est Sergei Fabiew, un autre agent du KGB, qui sera arrêté. L’espion, reconverti en homme d’affaires, avait monté un bureau d’études qui avait pour clients Dassault et d’autres constructeurs européens. Pendant des années, ce businessman flamboyant a acheté de nombreux documents confidentiels pour permettre à l’URSS de rattraper son retard dans les avions civils supersoniques. Au final, la ressemblance avec le Concorde était telle que le Tupolev soviétique était souvent surnommé «Concordski»… Mais les Russes n’ont pas été les seuls à vouloir s’approprier les avancées technologiques des Européens.

1965, un espion russe vole les plans du Concorde

Les Américains n’étaient pas en reste, en particulier certains techniciens de Boeing, qui ont aussi joué aux apprentis espions, avec plus ou moins de succès. Dans les années 1990, la compagnie Saudi Arabian Airlines était sur le point de conclure un juteux contrat avec Airbus. Montant : 6 milliards de dollars. Mais peu avant de signer, la compagnie saoudienne choisit finalement Boeing. Après enquête de la Commission européenne, on apprendra que les services secrets américains avaient intercepté des fax et des communications entre Airbus et les acheteurs potentiels, favorisant une contre-proposition de l’avionneur américain.

En mai 2006, un tribunal de Floride, saisi par l’entreprise Lockheed Martin, équipementier qui s’estimait lésé par une autre affaire, a infligé une amende de 615 millions de dollars à Boeing. En 1998, l’US Air Force avait attribué à Boeing le marché de la construction d’un lanceur spatial à 6 milliards de dollars. Boeing avait alors été accusé d’avoir dérobé plus de 37.000 pages de documents confidentiels à son principal concurrent. L’avionneur a même fini par publier des pages de publicité dans les journaux économiques américains pour s’excuser du comportement de deux ingénieurs et d’un cadre dirigeant.

Comme les Etats, les entreprises finissent souvent par lâcher les espions qui ont le malheur de se faire pincer… Au printemps dernier, c’est un autre scandale qui a éclaté, mettant en cause des avionneurs américains, mais aussi des services secrets européens. Le groupe EADS aurait en effet été espionné par les services de renseignements allemands. De 2008 à 2010, les services allemands auraient réalisé des écoutes téléphoniques pour le compte de la NSA. Un coup de canif dans les relations entre l’Allemagne et la France car les deux pays possèdent chacun 12% du capital de l’entreprise !

1993, Volkswagen recrute un ex-cadre de General Motors

Après l’aviation, l’industrie automobile est sans aucun doute le secteur le plus touché par l’espionnage économique. Et dans ce business, il n’est pas toujours nécessaire d’être un agent formé par les services secrets pour devenir un «007 de bureau». José Ignacio Lopez de Arriortua n’avait par exemple rien d’un colonel du KGB, mais il a tout de même fait trembler le géant General Motors. Cadre dirigeant d’Opel, la filiale allemande du constructeur américain, il a décidé de rejoindre Volkswagen en 1993. Rien de répréhensible, mais celui qui avait redressé le constructeur est parti avec plusieurs collaborateurs et surtout avec des documents confidentiels, dont des plans d’usine ultramoderne. Très vite, GM porte plainte contre cet ex-collaborateur détenteur de tant de secrets de fabrication. Le FBI est aux trousses du «Basque», qui risque cinq ans de prison et une très lourde amende. Soutenu par Ferdinand Piëch, le patron de Volkswagen, l’homme nie les faits. Il précise qu’il a bien eu en main des documents confidentiels avant son départ, mais qu’il les a tous détruits. Sauf que, en perquisitionnant la propriété d’un de ses proches, la justice découvre sous un escalier des cartons remplis de documents confidentiels renfermant des secrets industriels.

Pour l’image de Volkswagen, l’affaire est catastrophique. Le ministre de l’Economie du gouvernement allemand propose de jouer un rôle d’intermédiaire avec General Motors. Les journaux multiplient les scoops sur ce dossier. Le président américain Bill Clinton et le chancelier allemand Helmut Kohl s’en mêlent aussi. José Ignacio Lopez de Arriortua est contraint à la démission en 1996, et l’affaire se règle au plus haut niveau pour éviter un procès. En 1997, Volkswagen versera plus de 100 millions de dollars de l’époque à General Motors et s’engagera à acheter pour plus de 1 milliard de dollars de pièces détachées au constructeur américain. La même année, le cadre déchu sera condamné par la justice allemande à verser une amende de 400.000 marks. Ce sera le seul à payer les pots cassés de cette très rocambolesque affaire d’espionnage économique.

Un autre scandale, moins médiatique en Europe, mais tout aussi grave, a eu lieu en Asie, où le marché automobile est en plein essor. Le 10 mai 2007, cinq employés et anciens collaborateurs du constructeur automobile sud-coréen Kia Motors (groupe Hyundai) ont été arrêtés dans le cadre d’une enquête sur des secrets industriels vendus à la Chine. En Corée du Sud, le scandale est énorme et les médias parlent très vite du «plus gros scandale d’espionnage industriel de l’histoire du pays». Selon la justice, les cinq salariés auraient vendu 57 secrets industriels à des entreprises chinoises contre la somme dérisoire de 185.000 euros. Une excellente affaire pour l’industrie automobile chinoise pour combler son retard face aux autres constructeurs.

En Chine, le secteur automobile est coutumier de ce type de procédé, et en 2012, Volkswagen se plaindra ainsi d’avoir été pillé par un partenaire indélicat. Pour s’installer dans ce pays, les entreprises occidentales sont en effet obligées de réaliser des joint-ventures et de s’associer à des sociétés locales. La marque allemande va suspecter FAW, l’entreprise avec qui elle s’était alliée, de l’espionner et de piocher dans des documents confidentiels pour préparer des copies de certaines de ses voitures pour son propre compte. La France n’est pas à l’abri de ce pillage organisé, loin s’en faut. Et ce ne sont pas toujours des Chinois qui sont à la manœuvre.

2011, faux espions mais vrais barbouzes chez Renault

Le 5 septembre 2013, deux Allemands ont été pris en flagrant délit en train de trafiquer des bornes de rechargement d’Autolib’, ces voitures électriques en libre-service à Paris. Placés en garde à vue par la Brigade d’enquêtes sur les fraudes aux technologies de l’information (BEFTI), les deux techniciens de très haut niveau se faisaient passer pour des agents de maintenance du groupe Bolloré, opérateur d’Autolib. En fait, ils travaillaient pour P3 Group, un sous-traitant de BMW. Or, cette marque était alors sur le point de mettre sur le marché sa première voiture 100% électrique. Une coïncidence troublante qui n’a pas du tout été du goût de la société française : elle a immédiatement porté plainte.

En 2007, l’équipementier Valeo était heureux d’avoir engagé une certaine LiLi, brillante stagiaire chinoise, originaire de Wuhan, une ville où l’automobile est reine. La jeune femme de 22 ans donnait toute satisfaction jusqu’à ce qu’on s’aperçoive qu’elle recopiait des dossiers sans rapport avec son stage. Une source proche de l’affaire a affirmé que la police avait retrouvé au domicile de l’étudiante six ordinateurs et des disques durs externes «d’une puissance énorme». LiLi a expliqué aux enquêteurs qu’elle enregistrait toutes ces données pour ensuite faire le tri chez elle, tranquillement, afin de rendre un excellent rapport de stage. Incarcérée cinquante-trois jours, l’étudiante consciencieuse a tout de même été condamnée à deux mois de prison pour abus de confiance. Et non pour espionnage, car il n’a jamais pu être prouvé qu’elle comptait remettre les documents à un intermédiaire.

Avec toutes ces affaires, l’espionnage industriel est devenu la grande angoisse des entreprises. Une angoisse qui vire parfois à la paranoïa et à la barbouzerie, comme dans le scandale qui a secoué Renault en 2011. Le 3 janvier, trois cadres sont suspendus car ils sont suspectés d’avoir vendu à la Chine des documents confidentiels sur le programme de voiture électrique du constructeur français, contre de gros virements bancaires effectués à Dubaï. Eric Besson, alors ministre de l’Industrie, parle «d’une affaire d’une extrême gravité». Les trois hommes ont fait l’objet d’une enquête interne à Renault. Mais très vite, l’enquête officielle vire au fiasco et les policiers s’aperçoivent que le dossier a été monté de toutes pièces par certains membres du service de sécurité du fabricant français. Les cadres suspectés n’ont pas de compte à l’étranger et sont finalement blanchis. L’affaire causera le départ de Patrick Pélata, à l’époque directeur général et numéro 2 du groupe, la mise à l’écart de trois cadres dirigeants ainsi que le licenciement de trois responsables de la sécurité.

Toutes les affaires qui éclatent ne sont, pour beaucoup de spécialistes, que la partie émergée de l’iceberg, et la plupart des entreprises ne s’apercevront jamais qu’elles ont été espionnées. Heureusement, d’autres ont eu la chance d’être attaquées par de vrais Pieds Nickelés. Et elles échappent au pire.2007, pas très malin l’espion Michelin

C’est le cas de l’affaire qui a secoué Michelin à la fin des années 2000. Marwan Arbache, un chercheur du constructeur de pneumatiques, a, pendant des années, gardé des copies informatiques de nombreux secrets industriels sur lesquels il travaillait. En mars 2007, il démissionne de son poste et décide de vendre ces documents. Il prend contact avec Bridgestone en utilisant le pseudo d’Alexander Pablo de Santiago. Malheureusement pour lui, le fabricant japonais a prévenu son concurrent français. Les services de sécurité de la marque de Clermont-Ferrand n’ont eu aucun mal à le confondre. En utilisant le pseudo «Fukuda» pour faire couleur locale, ils l’ont appâté et ont transmis le résultat de leur enquête à la justice française. Arrêté le 9 janvier 2008, l’espion raté écopera de six mois ferme. Mais la marque tricolore a retenu la leçon et quelques mois plus tard a nommé un nouveau directeur à la sûreté du groupe. Son nom : le général Bernard Fesquet, l’ex-adjoint du directeur technique de la DGSE…

Dans la guerre de l’espionnage économique, tous les coups sont donc permis. Et même l’un des plus fameux secrets industriels n’est pas à l’abri.

Le 23 mai 2007, une ex-employée de Coca-Cola, Joya Williams, reconnue coupable d’avoir tenté de vendre au concurrent Pepsi-Cola des secrets de l’entreprise, a été condamnée à huit ans de prison. Assistante d’un cadre dirigeant de la marque, elle avait accès à de nombreuses informations qu’elle avait voulu vendre, en mai 2006. Mais Pepsi n’a pas joué le jeu et a alerté le FBI, qui l’a arrêtée. Beau joueur, Coca-Cola a remercié publiquement son concurrent en expliquant dans un communiqué : «La compétition est parfois féroce, mais elle doit surtout être juste et légale.» Les documents volés ne concernaient pas le célèbre Coca, dont la formule est, selon la légende, connue par seulement deux personnes, mais une nouvelle boisson que la marque souhaitait lancer. Le secret du Coke restant toujours le Graal des espions industriels…

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